Pourquoi féministe ? Réponse à un de nos correspondants

Monsieur,

Nous comprenons vos réactions d’autant que vous êtes d’une génération où les femmes mariées étaient juridiquement sous la tutelle de leur époux et par exemple ne pouvaient ouvrir un compte sans l’accord du mari. Vous avez vu des changements que les plus jeunes d’entre nous ne savent que parce qu’on le leur a dit.

Mais on a un peu trop fait la part belle au cliché de la féministe forcément hystérique hurlant sa haine des hommes. Vous admettrez que les luttes féministes pour une véritable égalité des droits, pour la libre disposition de leur corps par les femmes, au quotidien pour un véritable partage des tâches ménagères, ont eu des fondements justes.

Si nous ne sommes pas en Afghanistan, malheureusement les violences faites aux femmes restent un phénomène très inquiétant, pas du tout marginal : il faut une loi, il faut aussi des réponses très concrètes (trouver un toit, un soutien matériel et psychologique)– qu’une municipalité peut apporter- en termes d’aides pour sortir d’une situation infernale.

Les professions plutôt prestigieuses que vous énumérez ont, c’est évident pour l’enseignement, perdu de leur prestige depuis que les femmes y sont nombreuses, ce qui s’est traduit par une moindre progression des salaires que dans des domaines encore largement masculins. Et plus généralement, les postes à haute responsabilité restent très majoritairement occupés par des hommes. Vous citez des professions où on ne voit pas de femmes :”au fond de la mine, ni sur les chantiers de construction, ni courir derrière les camions de la voirie ou encore grimper sur les pylônes à haute (ou basse) tension...” Vous avez raison, on en voit très peu, ou pas mais le problème que vous soulevez est autre : malgré les belles promesses, la pénibilité et la dangerosité de nombreux métiers ne sont toujours pas prises en compte, alors que des études sérieuses montrent une espérance de vie inférieure de 7 ou 8 ans je crois par rapport aux professions du tertiaire non postées (le travail par poste réduit aussi l’espérance de vie). Les féministes n’oublient pas que des travailleurs sont exploités.

Aujourd’hui, en tout cas, peut-on admettre qu’à situation de travail identique les femmes continuent de gagner environ 25% de moins que les hommes ? Que leurs retraites (732 € par mois en moyenne) soient inférieures de moitié à celles des hommes (i532 €) et encore ces chiffres sont antérieures aux nouvelles réformes qui allongent la durée de cotisation , peut on l’accepter ? Peut-on admettre que 80% du travail partiel imposé le soit à des femmes ? Est-il normal qu’elles restent plus longtemps que les hommes au chômage ? Est-il juste que les femmes aient à assumer toujours bien plus largement que les hommes la charge d’élever les enfants et de gérer les tâches domestiques ? Sur ces points, malgré le senti des hommes, qui disent en faire bien plus qu’avant, les études sur la question montrent que ça n’a évolué que de manière minime : les femmes continuent d’en faire deux fois plus. Ces faits, ces chiffres, proviennent du dernier rapport de l’ INSEE , en date du 21 février 2008.

Alors oui, notre liste “une autre ville est possible” est féministe, comme elle est égalitaire, sociale, antiraciste, écologiste et démocratique. Nous, hommes et femmes de cette liste nous reconnaissons pleinement dans ces valeurs.

Merci de nous avoir écrit et permis de nous souvenir qu’un combat s’inscrit dans une histoire : cette histoire est loin d’être finie, nous allons le poursuivre ensemble si vous voulez bien.

Solidairement